La conjoncture économique, après une période difficile, connaît un nouvel essor. Après des années de restructurations, rationalisations et économies, les bénéfices des entreprises croissent à nouveau, grâce à quoi différentes entreprises ont amassé un « trésor de guerre » en liquidités. Pour augmenter les parts de marché et, par des économies d’échelle, continuer à contrôler les coûts, des concurrents ont souvent aussi été absorbés. Le nombre croissant de fusions et reprises confirme cette tendance.
En général, ces fusions et/ou absorptions se font avec ‘reprise des droits et obligations’ des membres du personnel. Pour les plans de pension complémentaire, il y a toutefois des particularités spécifiques qui, trop souvent, échappent à l’attention lors des négociations.
Certainement dans le cas de plans de pension à prestations définies (but à atteindre, defined benefit) se pose la question d’un financement suffisant des engagements de pension. Sur base des salaires actuels, il n’y aura probablement pas de problème car la législation belge impose des provisions minimales pour la carrière prestée. Etant donné que les organismes de pension sont responsables de l’exécution correcte de la législation en matière de pension, ils exigeront bien le paiement de dotations complémentaires si les exigences de financement minimum ne sont pas respectées.
En cas de reprise ou fusion, la valeur de la société doit toutefois faire l’objet d’une évaluation.
Dans ce cadre, la situation actuelle n’est pas la seule importante : les évolutions futures doivent aussi être prises en compte. Si la reprise ou fusion se fait avec maintien de l’ancienneté du personnel, chaque augmentation de salaire ultérieure dans un defined benefit ne provoquera pas seulement l’augmentation des coûts pour les années de carrière futures, mais aussi pour les années d’ancienneté reprises. Ou, en d’autres termes, si le plan defined benefit reste inchangé après reprise ou fusion, son coût futur augmentera plus vite si les membres du personnel conservent leur ancienneté. Concrètement, cela signifie qu’en cas de reprise ou fusion, les engagements de pension pour la carrière prestée ne doivent pas être évalués sur base des salaires actuels, mais sur base des salaires pension projetés. Cela dégagera évidemment une provision de pension nécessaire plus importante qui, en général, n’est pas encore constituée auprès de l’institution de pension. Le solde de cette provision viendra en déduction de la valeur de reprise ou devra être apuré au préalable.
Pour les sociétés cotées en bourse qui doivent tenir une comptabilité selon les standards IAS (Communauté Européenne) ou FAS (USA) cette méthode de calcul des engagements de pension est une contrainte annuelle.
Calculer les engagements de pension sur base des salaires pension projetés implique toutefois la connaissance des évolutions salariales futures. Etant donné que personne ne peut prévoir l’avenir avec certitude, certaines hypothèses doivent être faites quant à l’évolution des salaires, l’inflation, le rendement, les probabilités de départ, les risques de maladie, de mortalité, l’âge probable de pension (anticipée),… Tous ces paramètres influeront bien sûr sur le montant final de la pension et, par conséquent, sur la provision nécessaire (p.ex. : plus vite le salaire augmente, plus élevée sera la pension et plus élevée sera la provision pour la carrière déjà prestée).
Il est clair que cette évolution future est quelque peu subjective et la détermination des paramètres de projection fera donc partie des négociations autour de la reprise ou fusion. On ne peut toutefois pas assez insister sur le fait que d’infimes modifications de ces paramètres peuvent entraîner d’énormes différences dans les provisions pension et, par là-même, dans l’appréciation de la valeur d’une société.
Aussitôt la fusion ou reprise réglée, apparaît une nouvelle entité, au sein de laquelle coexistent différents statuts pour le personnel. A moins que les différentes divisions ne travaillent tout à fait séparément, sans mutations entre elles, de telles différences dans la gestion du personnel sont intenables. Une uniformisation des conditions de travail s’imposera et le plan de pension d’entreprise en fait souvent partie intégrante.
Pour modifier un plan de pension, le législation belge prévoit des règles et procédures strictes. Une obligation importante en cas de remaniement d’un defined benefit est la ‘gestion dynamique’. Cela signifie que, même en cas de cessation du defined benefit, le plan de pension devra annuellement être adapté (entendez augmenté) sur base des nouveaux salaires pour la carrière prestée avant son arrêt. Cela correspond donc exactement à la provision pension que nous calculons en cas de reprise ou fusion et montre que cette provision découle d’engagements relatifs à la carrière précédant la reprise ou fusion.
Dans un prochain numéro, nous approfondirons la matière relative à la pension après la reprise ou fusion. Quelles règles et procédures faut-il respecter en cas de remaniement d’un plan de pension d’entreprise ?